jeudi 15 septembre 2011

Notes From San Francisco (2011)


CD1: (Studio)

1. Rue The Day
2. Persuasion
3. B-Girl
4. Mississippi Sheiks
5. Wheels Within Wheels
6. Overnight Bag
7. Cruise On Out
8. Brute Force & Ignorance
9. Fuel To The Fire

Bonus Tracks

10. Wheels Within Wheels (Alternative Version)
11. Cut A Dash
12. Out On The Tiles

CD2: (Live)

1. Follow Me
2. Shinkicker
3. Off The Handle
4. Bought And Sold
5. I'm Leavin'
6. Tattoo'd Lady
7. Do You Read Me
8. Country Mile
9. Calling Card
10. Shadow Play
11. Bullfrog Blues
12. Sea Cruise

Comme je l'évoquais il y a quelque mois dans un article sur les sessions de San Francisco et l'album avorté la possibilité d'avoir entre les mains cet album semblait vaine. Rory l'ayant rejeté en bloc et ayant peu envisagé de le voir sortir un jour, hormis dans une interview de 1992 où il évoquait la possibilité qu'il sorte en ayant été remixé au préalable.
D'emblée on peut se poser la question du bien fondé de la démarche de Donal Gallagher, lui qui habituellement se fait un point d'honneur de respecter la parole de son frère. Il faut cependant se souvenir que contrairement à Rory, il avait été emballé par le travail fait lors des sessions de 1977/1978.

C'est donc le 6 juin 2011 que l'album avorté de 1978 sort sous le nom de Notes From San Francisco. Deux versions sont disponibles: une édition simple comprenant l'album avorté et un live de 1979 à San Francisco et une édition collector présentée sous la forme d'un carnet comprenant les deux CD précédemment cités mais se voyant agrémenté des notes de Rory ainsi que d'un lot de quatre cartes postales. Répliques exactes de celle qu'aurait envoyé Rory à l'époque où il était en studio à San Francisco.




Avant de se lancer dans l'analyse de l'album studio, il est bon de se remémorer que conformément à la dernière déclaration de Rory au sujet de l'album, il a été remixé (suppressions ou ajouts d'overdubs) et a en plus subit un remastering (amélioration de la qualité sonore d'un enregistrement ancien en employant des technologies de post production numérique). Et c'est sur ce dernier point que Notes From San Francisco pèche grandement, en proposant un son lourd dénué de toutes nuances.

Le premier titre qui ouvre l'album Rue The Day est bien connu de tout amateur de Rory depuis sa parution en 1999 sur la réédition de l'album Calling Card. Ici il se voit agrémenté d'une petite intro de piano de Lou Martin et se démarque de la version connue par la mise en retrait de l'harmonica et de la voix de Rory qui habituellement chantonne par dessus le solo.

Persuasion est le titre sur lequel j'émets le plus de réserve. L'autre version de ce titre connue figure en bonus track sur la réédition de 1999 de l'album Deuce de 1971. Les deux versions proposent des similitudes troublantes, (chant et solo identique). La seule différence notable provient du mixage avec l'ajout du clavier de Lou Martin. Après maintes écoutes j'en ai tiré les hypothèses suivantes:
- Persuasion est effectivement un titre enregistré une première fois en 1971 avec Wilgar Campbell à la batterie et Gerry McAvoy à la basse et une seconde version de ce titre a été enregistré en 1977 avec cette fois Rod De'Ath à la batterie et le clavier de Lou Martin. Mais la grande question est de savoir pourquoi le chant et les parties de guitares de Rory sont identiques sur les deux versions.
- Ou alors Persuasion a uniquement été enregistré en 1977 et le bonus track de Deuce serait en réalité un faux inédit. Ce qui il faut admettre serait absolument scandaleux.

B-Girl est comme le titre d'ouverture bien connu des possesseurs de la réédition de Calling Card de 1999. Il s'agit en effet de la première version de ce que sera Public Enemy N°1 sur Top Priority. Pas de grand changement notable avec la version connue.
Mississippi Sheiks se révèle plus surprenant par contre. Le fameux mid tempo de l'album Photo-Finish se démarque par l'introduction du violonniste Joe O'Donnel. Une insertion assez raccord avec le thème de la chanson puisque le Mississippi Sheiks était un orchestre blues des années 30 incluant un violoniste. A noter qu'à la même période de l'enregistrement de l'album Rory a joué sur l'album Gaodhal's Vision de Joe O'Donnel.

Wheels Within Wheels est en réalité le même titre paru sur la compilation posthume du même nom en 2003. La version présente sur NFSF est identique à cette dernière mais se voit habillée d'une partie de slide électrique qui bien que pas indispensable ajoute à l'aspect mélancolique du titre.
Le remixage opéré sur Overnight Bag ne retire pas cette impression chaotique qui s’immisçait déjà dans la version parue sur la compile best of "Crest Of The Wave" de 2009. Pour rappel Rory a dissous le quartette car il se sentait étouffé par les claviers. Une simple écoute de ce titre permet de comprendre ou de partager son sentiment.

Rien de bien notable sur la version de Cruise On Out - le morceau d'inspiration Sun Records de Photo-Finish si ce n'est l'introduction du piano de Lou Martin. L'énergie déployé par le groupe suffit à elle seule à faire décoller le titre.
Brute Force & Ignorance l'hommage au mouvement Punk de Photo-Finish diffère par l'insertion du clavier et de cuivres. Une version que je trouve pour ma part un peu molle, le chant de Rory étant assez moyen. D'ailleurs c'est un reproche que l'on peut faire à l'ensemble de l'album, Rory est très peu investit vocalement sur la plupart des titres.

Jusqu'à présent les différences avec les versions de Photo-Finish étaient plus de l'ordre de l'ajout ou de la suppression d'instruments. Fuel To The Fire est l'unique titre de ces sessions qui a vu une refonte totale de ses arrangements. Avec la version de Photo-Finish seul subsiste les paroles, la version de San Francisco propose un gimmick totalement différent beaucoup plus léger et moins oppressant que sur la version que Rory gravera avec le RGB MK III. Le solo d'inspiration gilmourienne qu'il signe là est sans conteste l'un des plus beaux de sa carrière. La bonne surprise de l'album.

Trois Bonus Tracks figurent à la fin de l'album. Le premier étant une version alternative de Wheels Within Wheels jouée avec l'intégralité du groupe. Le second Cut A Dash est un Rock un peu obscur où Rory joue avec les tonalités graves de sa guitare. Et le dernier Out On The Tiles est un brûlot (Hard) Rock qui aurait parfaitement eu sa place sur les deux premiers albums du second trio.



Le second CD composant Notes From San Francisco propose un concert à San Francisco du Rory Gallagher Band MK III au Old Waldorf datant de décembre 1979. Hormis le lieu du concert rien ne rattache réellement ce concert à l'album avorté. Son contenu étant davantage centré sur les compositions de Top Priority voir même de Calling Card.
Autant le dire tout de suite les réfractaires au second power trio et à la face Hard de Gallagher peuvent passer leur chemin. Ceci dit on est assez loin de Stage Struck en terme d'interprétation même si l'acoustique n'est pas non plus présent, le jeu de Rory se veut plus nuancé et moins pied au planché que sur le live de 1980.

Notes From San Francisco n'est donc pas un sans faute, loin s'en faut ! La piètre qualité du mixage et du remastering fait naître beaucoup de regrets sur un projet, qui si il s’avérait moralement discutable, semblait tenir toutes ses promesses sur le papier. Pour le fan le moins intransigeant cela reste un superbe objet collector qui malgré ses défauts permet de faire définitivement la lumière sur l'épisode le plus entouré de mystère de la carrière de Rory Gallagher.


Et pour étayer mes doutes sur la version de Persuasion, je vous laisse vous même juger en vous proposant les deux versions:

 

Et la version bonus track de la réédition de l'album Deuce:





mardi 31 mai 2011

Participation Discographique n°1: Mike Vernon - Bring It Back Home

Parallèlement à sa carrière solo, Rory Gallagher a prêté main forte à de nombreux artistes tout au long de sa carrière. Officiant comme sideman sur des projets plus ou moins réussi, il est intéressant de voir comment il était capable d'évoluer d'un genre à l'autre, d'apporter sa touche personnel comme de s'effacer au profit de l'artiste qu'il accompagne.

La première participation discographique notable de Gallagher remonte à 1971, sur l'album Bring It Back Home du producteur Mike Vernon (producteur entre autres du Beano de John Mayall et du tout premier David Bowie).


1. Let's Try It Again
2. Move Away
3. Mississippi Joe
4. Brown Alligator
5. Come Back Baby (Rory Gallagher)
6. Dark Road Blues
7. She Didn't Have Time
8. Ain't That Lovin' You Baby
9. My Say Blues
10. War Pains (Paul Kossoff)

Bring It Back Home est à voir comme un petit plaisir coupable de Mike Vernon, qui après avoir produit tant d'artistes n'a pas résisté à l'idée de sortir son propre album. Pour un premier et unique effort Vernon s'en sort avec les honneurs, malgré des faiblesses évidentes l'album se laisse écouter.

La présence de Rory Gallagher et de Paul Kossoff (guitariste de Free) sert quelque peu de faire valoir et apporte une certaine légitimité et crédibilité au disque.
L'apport de Rory se résume au titre Come Back Baby, reprise du bluesman Doctor Ross paru en single sur le label Sun Records en 1953.
Malgré une durée similaire, la version de Vernon sonne plus pop, plus british mais est bien plus agressive que l'originale.
Sur les solos émaillant le titre, on retrouve le Rory bestial dans le prolongement de l'album éponyme paru la même année.

Version de Mike Vernon:



Version originale de Doctor Ross:

vendredi 6 mai 2011

Wheels Within' Wheels (2003)



1. Wheels Within' Wheels - 3:32
2. Flight To Paradise - 4:30
3. As The Crow Flies - 4:12
4.Lonesome Highway - 5:20
5. Bratcha Dubha - 2:59
6. She Moved Thro' The Fair/ An Crann Ull - 2:22
7. Barley And Grape Rag - 4:25
8. The Cuckoo - 3:45
9. Amazing Grace - 1:20
10. Walkin' Blues - 5:34
11. Blue Moon Of Kentucky - 2:54
12. Deep Elem Blues - 4:17
13. Going To My Hometown - 4:58
14. Lonesome Highway Refraining - 2:00

Nul ne sait ce que serait advenu de la carrière de Rory Gallagher si il avait vécu, mais dans ses dernières interviews ce dernier faisait part de son envie de sortir un double album avec une face électrique et une acoustique.
C'est pour combler cette lacune que sort la compile Wheels Within' Wheels en 2003, retraçant sur 14 titres la virtuosité et la face acoustique de Rory. Cette compile réussie le paris de montrer la versatilité de Gallagher dans ce registre montrant au passage que parmi les musiciens Rock de sa génération aucun autre ne maîtrisait mieux que lui les différents styles acoustiques.
Mais comme le sous entend la pochette au design de masque mortuaire (cf. pochette réalisée par David Oxtoby) cette compile est aussi un hommage posthume (tardif c'est vrai !) au guitariste décédé 8 ans plus tôt.



L'album s'ouvre sur le poignant Wheels Within' Wheels qui donne son nom à la compilation. Un titre enregistré en 1977 lors des sessions de San Francisco pour l'album avorté. On y retrouve Rory en état de grâce accompagné par les parties de piano subtiles de Lou Martin.

Grand fan de Flamenco, Rory se définissait comme étant "un guitariste de Flamenco contrarié", pour autant c'est avec brio qu'il se joint au guitariste de Flamenco : Juan Martin. Enregistré en 1984 à la même époque où Gallagher à rejoint Martin et les guitaristes Richard Thompson et David Lindley dans le cadre de la tournée acoustique "Guitarists Nights". Flight To Paradise est un instrumental de haute volée où Rory sert habilement le propos à son acolyte espagnol qui fait étalage de sa maîtrise de son style de prédilection.

Bien que déjà connu car figurant sur le fameux Irish Tour '74, As The Crow Flies (de Tony Joe White) est présenté sous sa forme studio et toujours joué sur la National Triolian de 1935. Une très bonne version mais qui ne supplante pas la version du live de 1974.
Lonesome Highway est le joyaux de cette compilation ! Unique titre de l'album mariant électrique et acoustique avec des parties de slide dont le feeling rappel par moment Ry Cooder. Il est enregistré en 1975 lors des sessions de Against The Grain, ce n'est que justice de le voir figurer sur un album officiel près de 30 ans après.

Enregistré en 1994 avec les guitaristes Folk Chris Newman, Martin Carthy et la harpiste Maire Ni Chathasaigh, Bratcha Dubha est dans une veine Folk celtique. Il s'agit d'un des derniers titres enregistrés par Rory au court de sa carrière.
L'album se pare à nouveau d'une ambiance celte sous les traits de She Moved Thro' The Fair/An Crann Ull deux airs traditionnels joués en medley et sur lesquels Rory est accompagné du célèbre guitariste de Folk anglais Bert Janch.

Autre titre bien connu du répertoire de Rory, car figurant sur l'album Calling Card de 1976 - Barley And Grape Rag est revisité ici avec le groupe de musique irlandaise The Dubliners pour un résultat encore plus festif que l'original.
Enregistré en 1977 sur le studio personnel du guitariste et ami Roland Van Campenhout - The Cockoo compte parmi les plus belles reprises de Rory. Initialement Gallagher jouait seul, mais en 2002 Roland à rajouté un accompagnement discret pour meubler un peu l'espace laissé vide. Le résultat n'en n'est que meilleur.

Rory et Belà Fleck au Festival de Montreux 1994

L'intégration du set acoustique de Montreux 1994 est discutable. Il aurait très bien pu figurer sur un album spécialement dédier à cette édition du festival. Ceci dit les échanges improvisés entre Rory et le joueur de banjo Belà Fleck sur les titres Amazing Grace/ Walkin' Blues/ Blue Moon Of Kentucky justifie sa place sur cette compilation.

Rory retrouve à nouveau le guitariste Roland Van Campenhout, sur le titre Deep Elm Blues interprété lors des fêtes de Gand en Belgique.
Autre grand standard live Going To My Hometown est repris en duo avec l'idole de Rory - Lonnie Donnegan - le maître du skiffle sur lequel tous les guitar hero anglais des 60's ont fait leur premières armes.
La compilation se termine avec la version acoustique de Lonesome Highway, rebaptisé pour l'occasion Lonesome Highway Refraining. Une superbe version bien que frustrante car elle se termine rapidement en fade out.



Au final, Wheels Within' Wheels s'avère être un bel hommage mais inégal. A vouloir être trop hétéroclite la compilation se perd un peu et aurait gagné à être un peu plus cohérente. L'idée d'un double album présentant une face studio et une face live aurait été plus judicieuse et aurait vraiment fait honneur au talent de Rory Gallagher dans ce registre.







jeudi 5 mai 2011

BBC Sessions (1999)


In Concert:


1. Calling Card - 8:25
2. What In The World - 9:17
3. Jacknife Beat - 8:59
4. Country Mile - 3:17
5. Got My Mojo Working - 5:17
6. Garbage Man - 5:54
7. Roberta - 2:37
8. Used To Be - 4:59
9. I Take What I Want - 6:57
10. Cruise On Out - 5:48

Studio:


1. Race The Breeze - 6:53
2. Hands Off - 4:58
3. Crest Of A Wave - 3:57
4. Feel So Bad - 4:58
5. For The Last Time - 4:13
6. It Takes Time - 4:28
7. Seventh Son Of The Seventh Son - 7:59
8. Daughter Of The Everglades - 6:12
9. They Don't Make Them Like You Anymore -3:58
10. Tore Down - 5:14
11. When My Baby She Left Me - 5:00
12. Hoodoo Man - 7:23

Première sortie officielle depuis la mort de Rory Gallagher, BBC Sessions retrace les prestations de Rory pour la BBC de 1971 à 1986. Comme à son habitude la série des BBC Sessions est composé d'une partie concert (CD1) et d'une partie studio (CD2).

Le premier CD se révèle être un véritable trésor... il faut se remémorer que le dernier album contenant des extraits Live remonte à 19 ans en arrière avec Stage Struck. On y trouve bien sûr des titres issus des albums du guitariste mais hormis What In The World, aucun titre présent sur ce CD n'avait été présenté sous leur version Live sur un support officiel.
Aussi on distingue clairement qu'une large place a été faite aux extraits de l'époque du quartette (Rory Gallagher Band MKII), certains titres étant particulièrement monstrueux montrant Rory et son (ses) groupe au meilleur de sa forme. Le Blues domine aussi clairement sur ce double album: Garbage Man, Got My Mojo Working... faut-il y voir là une manœuvre pour contrecarré la compilation posthume sortie 4 ans plus tôt ?

Le second CD bien sûr n'est pas en reste, Rory revisitant en studio les titres de ses premiers albums et avec brio pour certains (For The Last Time, Crest Of A Wave...)



Rory ayant été l'artiste le plus enregistré par la BBC, on peut espérer voir d'autres sorties à l'avenir. Même si la sortie de l'intégrale des enregistrements est peu envisageable car trop importante pour être commercialisable. On peut toutefois trouver sur le net d'autres enregistrement de la BBC, notamment Alternate BBC Sessions 1971/1974.
Aussi la sortie d'un DVD des prestations de Rory filmées par la BBC est envisagé par Donal Gallagher:

"Une fois que nous auront vu ce qu'il y a, nous essaierons de sortir une sorte de DVD Rory at The BBC. Encore une fois cela dépendra de si l'on trouve un partenaire près à nous aider à le sortir."





A Blue Day For The Blues (1995)


1. I Ain't No Saint
2. The Loop
3. Calling Card
4. As The Crow Flies
5. Off The Handle
6. Bullfrog Blues
7. (Back On My) Stomping Ground
8. Empire State Express
9. Continental Op (To Dashiell Hammet)
10. Shin Kicker
11. Public Enemy N°1
12. Pistol Slapper Blues
13. Don't Start Me To Talkin'
14. Nothing But The Devil
15. Alexis
16. Barley And Grape Rag

Sorti dans la hâte après le décès de Rory en juin 1995, A Blue Day For The Blues est le premier hommage posthume rendu au défunt guitariste.
Publié par le label IRS (le même qui a distribué Fresh Evidence outre atlantique 5 ans plus tôt) en octobre 1995 pour le marché américain, il s'agit d'une compilation posthume qui a pour objectif "comme son nom l'indique" de mettre en avant la facette Blues de Rory Gallagher.
L'album aligne 16 titres sans réel soucis d'ordre chronologique mais présente l'intérêt de montrer la variété de style de Blues qu'était capable de jouer le guitariste irlandais.
Malheureusement épuisé cet album fait figure d'objet collector pour les rares chanceux qui le possède.


L'album étant sorti sans l'autorisation de Donal Gallagher, qui après le décès de son frère est devenu logiquement le gestionnaire du patrimoine de ce dernier, cela expliquerait pourquoi il n'a jamais été réédité depuis.

"J'ai été réellement bouleversé au sujet de cette sortie parce qu'il n'avait pas les droits pour faire une compilation et ils l'ont fait sans mon autorisation. I.R.S était sans dessus dessous à cette époque et ils étaient désespéré de sortir quelques choses qui serait vendeur pour eux."

Donal Gallagher

samedi 30 avril 2011

Irish Tour '74 (Tony Palmer's Film)



Le 12 avril dernier sortait en DVD et Blu Ray la version remastérisé du fameux film Irish Tour '74 de Tony Palmer, accompagné du documentaire Music Maker retraçant le concert de Rory Gallagher au Savoy Cinema de Limerick (Irlande) et d'images rares de Rory et de son groupe lors de sa tournée japonaise de janvier 1974.

DVD original sorti en 2000

Irish Tour '74 fait écho à la tournée ayant donné naissance au célèbre album Live du même nom. L'équipe de tournage de Tony Palmer (à qui l'on doit le film Cream Farewell Concert) a suivit Rory et son groupe à travers sa tournée irlandaise (dans les villes de Cork, Belfast et Dublin) en filmant son quotidien - sur scène et en dehors de la scène. La réussite majeure de ce film est d'avoir réussie à retranscrire l'humanité de Gallagher et la proximité avec son public. 

Tony Palmer, réalisateur de Irish Tour '74

Le film souffre toutefois d'un montage final bancal et de choix artistique du réalisateur assez discutable.
La prolifération de gros plan sur le visage de Rory s'avère frustrant quand ce dernier s’escrime sur son instrument. De même les multiples faux raccords que même la remastérisation n'a pu entièrement corriger rend certains passages incohérents.


Toutefois le film ne se résume pas à sa partie concert, Palmer a réussi à magnifier l'Irlande natale de Gallagher en offrant certains plans de toute beauté. Comme le plan d'ouverture où les vagues d'une mer déchaînée viennent se briser les rochers. Les scènes d'interviews (malheureusement non sous-titrés) mettent en avant l'état d'esprit de Rory (ce dernier commentant en voix Off tout au long du film) et son approche de la musique et du métier de musicien.


Contrairement à ce que le titre laisse penser, il ne s'agit pas d'une transposition littérale de l'album live sur grand écran. En effet de l'album original seulement deux titres figurent à l'identique dans le film (Walk On Hot Coals et Tattoo'd Lady), le reste étant des variantes de ce que l'on retrouve sur le LP. As The Crow Flies, Who's That Coming, Cradle Rock et A Million Miles Away étant livré dans de nouvelles versions - Hand Off et Bullfrog Blues font par contre figure d'inédits.

Tracklist:

Walk On Hot Coals
Tatoo'd Lady
Who's That Coming
A Million Miles Away
Going To My Home Town
Cradle Rock
As The Crow Flies
Hands Off
Bullfrog Blues

Cette réédition inclut en bonus un documentaire bien connu de tous les bootleggers: Music Maker. Retraçant le concert du 11 mai 1972 au Savoy Cinema de Limerick, lors de la tournée irlandaise de Gallagher. Contrairement aux interviews du film, l'interview de Rory de ce documentaire est sous-titrée. Il y fait part de ses influences, de ses débuts dans les showbands et l'aventure Taste.
Les chansons disponible dans le documentaire sont les suivantes:

Tore Down
Laundromat
Pistol Slapper Blues
Don't Know Where I'm Going
Bullfrog Blues



Un concert qui prend une dimension symbolique car il s'agit du premier concert avec Rod De'Ath en remplacement de Wilgar Campbell.


L'autre bonus de cette réédition est l'intégration d'un film de 11 minutes retraçant la tournée japonaise du Rory Gallagher Band MK II de janvier 1974. On y voit notamment Rory et ses musiciens en compagnie de ses fans nippons lors de leur arrivée. Le petit film est accompagné d'une version énergique de In Your Town du concert de Nagoya du 27 janvier 1974 en fond sonore.

mardi 29 mars 2011

You don't need no doctor, you don't need no pill...


Rory Gallagher a laissé à la postérité le souvenir d'un musicien puriste et talentueux partageant son art avec enthousiasme et humilité. Derrière le musicien se cache un homme, effacé et solitaire, en proie à des démons qui culmineront pendant la deuxième partie de sa carrière.
Cet article n'a aucunement pour but de donner dans le voyeurisme, mais de tenter d'expliquer comment un musicien élevé au rang d'icône a pu sombrer petit à petit dans l'enfer de la dépendance aux médicaments et à l'alcool. Et aussi de remettre les pendules à l'heure concernant certaines rumeurs persistantes sur ce sujet.

D'après Donal Gallagher (frère et manager de Rory), les premiers signes du malaise ont commencé à faire surface à la fin des 70's. Comme Wilgar Campbell (batteur du RGB MK I) quelques années auparavant, la peur chronique de prendre l'avion a fini par faire surface.
Mais Rory ne pouvait laisser cette peur le dominer, ne plus prendre l'avion c'était tout simplement tirer un trait sur sa vie de musicien. Pour palier à ce stress, il se fait prescrire des médicaments qui ont pour effet d'atténuer cette peur. Mais très vite il va en prendre pour d'autres raisons comme l'explique son frère:

"Je pense que c'était la pression. Il portait trop de casquette à la fois. Il était son propre producteur, son propre compositeur, son propre manager... avec toute la tension, les tablettes de pilules devaient probablement le détendre, aussi il a commencé à en prendre pour d'autres raisons. Bien sûr après elles n'étaient plus assez fortes, alors il retournait constamment chez le médecin pour augmenter les doses. Rory était très discret à propos de tout ça. Il allait les avaler dans la salle de bain."

Comme tout bon irlandais qui se respecte, l'alcool fait parti du folklore et finit inévitablement par se joindre à la fête. C'est un thème récurrent des chansons de Rory, mais dans les 70's il est abordé avec beaucoup de légèreté (Too Much AlcoholBarley & Grape Rag) alors qu'à partir des 80's le ton se fait beaucoup plus grave et ce thème est abordé avec beaucoup plus de pessimisme et de fatalité (Ghost Blues).
L'alcoolisme de Gallagher s'accompagnait d'une prise excessive de comprimés en tout genre. Parmi ces derniers on dénombre une prise régulière d'anabolisants (ou stéroïdes) couplé à l'alcool les effets sont dévastateurs comme l'explique Donal:

"J'ai réussi à le faire entrer dans une clinique et le médecin a dit [Vous réalisez que le problème n'est pas tellement l'alcool. C'est les pilules ! ] Il a fustigé le médecin privé de Rory de lui avoir prescrit la quantité de chose qu'il avait. Ce n'était pas une prescription de tablettes, c'était la combinaison. Jeté dans l'alcool et vous obtenez un cocktail détonnant."


La prise de ces médicament entraîne des changements physiques chez Gallagher. Une métamorphose clairement visible à partir de 1987, date de la sortie de l'album Defender, le guitariste a pris énormément de poids. Les 5 années de silence discographique couplé à l'annulation de l'album de 1986 (Torch) ayant sûrement été des soucis supplémentaires qui ont joué leur rôle dans l'aggravation de l'alcoolisme et la prise de comprimés de Rory. Et si l'on ajoute à cela l'immense solitude qu'éprouve Gallagher lorsqu'il n'est pas en tournée.

D'après Donal Gallagher, il n'a réellement pris conscience de l'état de son frère qu'à partir de 1990. Voyant que l'inactivité renforçait encore plus son mal être, il décide de le faire tourner un maximum: "Le seul remède pour Rory était de le garder actif, lui donner des dates et lui donner une vie...".
Mais même une fois sur la route, il n'arrête pas pour autant ses mauvaises manies et certains concerts pâtissent de ce comportement. Comme ce concert de décembre 1992 au Bataclan (Paris) où le guitariste visiblement imbibé d'alcool et sous l'effet des médicaments offre un spectacle déconcertant pour l'assistance.
Ce genre d'incidents devient vite récurrent comme l'explique Donal:

"A un des concerts londonien important, Rory a visiblement pris des tablettes ou quelque chose du même genre et les a immergés dans un verre de Cognac. Il allait bien avant de monter sur scène. Mais dans les 20 minutes à une demi heure, il ne pouvait pas comprendre pourquoi ses doigts étaient engourdis."

Comme le montre certains boots du débuts des 90's, les effets de l'addiction ont un impact sur la musique interprétée. Par moment Rory semble chercher ses notes ou les faits durer plus que de raison et lorsqu'il chante il peine à reprendre son souffle par moment.
Mais lorsqu'il est mis à l'écart des comprimés, il lui arrive de donner le meilleur de lui même comme le démontre le concert de Montreux 1994 ou le concert de Cologne de 1990.

"Sur l'une des dernières tournées, j'ai fais irruption dans son dressing, volé son sac dans le but de prendre les médicaments et voir ce qui allait se passer. Ses symptômes de sevrages étaient colossaux. Après une semaine, il transpirait les toxines et son appétit était revenu. Après trois semaines, il jouait mieux que jamais."
Malgré toutes les tentatives de Donal, les effets dévastateurs de l'alcool et des médicaments ont mis à mal la santé de Rory et provoqué des dégâts irréversibles au foie.
Lors de son ultime concert le 10 janvier 1995 aux Pays-Bas, il s'écroule sur scène. En mars de la même année, il subit une greffe d'urgence qui s'avère dans un premier temps un succès:

"Il entrait et sortait du coma et j'ai dû prendre la décision de faire une transplantation de foie, " raconte Donal. "Je ne m'attendais pas à être confronté à quelque chose comme ça, et l'horloge tournait parce que nous devions attendre un donneur."

Mais un microbe attrapé peu après l'opération va affaiblir son système immunitaire qui va conduire au rejet de la greffe. Les tentatives durant cette période de 3 mois d'agonie vont toutes échouer. Malgré les bons mots de rétablissement d'un Bob Dylan et les quelques notes d'harmonica de Mark Feltham, Rory décède le 14 juin 1995 au Kings College Hospital de Londres à seulement 47 ans.



Kings College Hospital de Londres
A l'annonce de son décès, les hommages affluent de toutes parts, ventants le talent et la générosité du défunt guitariste. Comme un rappel à ceux qui l'ont oublier, un journaliste du Irish Times dira: "Rory était dans tous les esprits le mercredi (jour de son décès), mais combien pensaient à lui le mardi ?"
Les obsèques de Rory ont lieu le 17 juin 1995 à Cork dans l'église du Saint Esprit en présence de sa famille, ses proches et ses vieux compagnons de route ainsi qu'une foule d'admirateurs venue lui rendre un dernier hommage.
Son corps repose au St Oliver's Cimetery à la sortie de la ville.

Tombe de Rory Gallagher au St Oliver's Cimetery

"It's better to burn out than to fade away" comme le dit un autre solitaire, Rory Gallagher a malheureusement choisit la seconde option, ce qui rend son trépas bien plus amer encore...

lundi 14 mars 2011

Fresh Evidence (1990)

For The Last Time


1. Kid Gloves - 5'40
2. The King Of Zydeco - 3'43
3. Middlename - 4'15
4. Alexis - 4'07
5. Empire State Express - 5'08
6. Ghost Blues - 8'01
7. Heaven's Gate - 5'09
8. The Loop - 2'23
9. Walkin' Wounded - 5'09
10. Slumming Angel - 3'40

Bonus Tracks de la réédition de 2000:


1. Never Asked You For Nothin' - 4'29
2. Bowed Not Broken - 3'26

Que de chemin parcouru depuis l'époque Taste ! Vingt années après le dernier opus de la fameuse formation (cf. On The Boards) peu d'artistes peuvent se vanter d'avoir eu une carrière aussi remplie, tant sur le plan discographique que scénique. Si les 80's ont été un virage déroutant pour plus d'un artiste issu de la même génération que Rory. Ce dernier malgré deux opus légèrement inférieur à su résister aux modes et préserver sa musique de toute emprise extérieure.
Malheureusement cette indépendance a un prix, passé de mode aux yeux des maisons de disques (qui lui préfèrent un Stevie Ray Vaughan ou un Gary Moore), il essuya plusieurs refus de la part de certains distributeurs (notamment aux Etats-Unis) pour sortir Fresh Evidence. Il trouvera toutefois écho au près de IRS Records qui publia son ultime album le 1er mai 1990.

Pochette Originale
Fresh Evidence marque encore plus que son prédécesseur Defender, l'ambition du guitariste de renouer avec les racines Blues. Délesté de la production 80's qui faisait défaut sur l'album précédent, ce nouvel opus gagne en crédibilité et en profondeur. Malgré un line up inchangé (Brendan O'Neil, Mark Feltham et Gerry McAvoy évoluant toujours à leur poste respectif) le groupe élargit son champ de vision musical avec l'apport de musiciens extérieurs (Geraint Watkins à l'accordéon, Lou Martin et John Cooke aux claviers et la section de cuivre assurée par John Earle, Ray Beavis et Dick Hanson)
Gallagher renoue avec la versatilité des premiers disques et sa vision du Blues tranche considérablement avec la tendance en vogue à l'époque. Ici le texte prévaut autant que les parties de guitares et n'est pas prétexte à d'interminable solos. Le Blues est le langage de l'âme et cela le guitariste l'a bien compris.

Kid Gloves qui ouvre l'album est un Rock énergique soutenu par une section de cuivre et par le piano de Lou Martin (dont c'est la deuxième apparition sur un album de Rory depuis Defender). Le texte est dans la lignée des thèmes appréciés par Rory - à savoir les histoires d'espionnages et de romans noirs. 

Loanshark Blues sur l'opus précédent montrait l'intérêt de Rory pour le Swamp Blues et le Blues à tendance Cajun/Zydeco. Avec The King Of Zydeco, il embrasse littéralement le genre avec l'apport de l'accordéon de Geraint Watkins (célèbre pianiste et accordéoniste qui outre Rory a joué avec Dr Feelgood, The Fabulous Thunderbirds, Eric Clapton...). Le titre est avant tout un hommage à l'accordéoniste Clifton Chenier.


Middlename est lui aussi un hommage mais à John Lee Hooker cette fois. La rythmique est lourde et hypnotique et l'apport de l'harmonica de Mark Feltham ne fait que renforcer les parties de guitares finement ciselées de Gallagher.
Alexis est un instrumental dans le pure style Zydeco où il est cette fois question de rendre hommage à Alexis Korner, le pionnier du British Blues avec John Mayall. Rory a eu la chance de le côtoyer, notamment à ses débuts lorsqu'il officiait dans les showbands.


Gallagher l'a prouvé tout au long de sa carrière, sa maîtrise de la steel guitar et du Delta Blues en font l'un des plus grands spécialistes du genre. La reprise de Empire State Express du bluesman Son House montre que Rory est l'un des rares guitaristes anglais (et même au monde) a être capable de rentre justice à un tel morceau.
Ghost Blues avec son intro sur fond de mandolas et de synthé est un titre Blues assez pessimiste en dépit de son rythme frénétique. Rory y traite de l'alcool comme dans bien des titres de sa discographie, mais à la seule différence où les paroles semblent faire écho de son propre alcoolisme. Avec une issue pour le moins tragique...

Un malaise d'autant plus renforcé par le titre suivant Heaven's Gate (littéralement La porte du paradis) qui conte l'histoire d'une impossible rédemption. Musicalement on se retrouve dans le prolongement de Middlename avec des échanges d'harmonica et de guitares de hautes volées.
Si Gallagher a inséré The Loop dans la setlist de ses concerts à partir de la fin des 80's, il faudra attendre 1990 pour le voir intégrer un de ses albums. Il s'agit d'un instrumental dans une veine Chicago Blues qui fait allusion au métro aérien de la ville de Chicago comme en témoigne le son de métro en introduction du titre.
Walkin' Wounded est un titre blues/rock dans la pure tradition Gallagherienne. Avec de splendides interventions de saxophones.
L'album original se termine avec Slumming Angel, un titre Rock plus classique se démarquant du registre Blues prononcé du reste de l'album.

Le remaster de 2000 voit l’intégration de deux bonus tracks: Never Asked You For Nothin' un shuffle blues dans une veine cajun/zydeco où l'accordéon de Geraint Watkins fait de nouveau des merveilles. Bowed Not Broken joue la carte du Rock et montre clairement ce qu'aurait pu donner certains titres Rock des albums des 80's, si ils avaient bénéficié d'une production adaptée. Car sans être une merveille ce titre reste agréable à l'écoute, notamment grâce aux légers traits de slide émaillant les couplets.


Bien que diversifié, original et personnel - Fresh Evidence ne trouvera pas son public et la descente aux enfers amorcée depuis 1987 entraînera Rory Gallagher jusqu'à ce jour fatidique de juin 1995.
Ce qui devait s'avérer être comme une renaissance se transforma en testament musical...





jeudi 10 mars 2011

Defender (1987)

Back to the Roots



1. Kickback City - 4'51
2. Loanshark Blues - 4'29
3. Continental Op - 4'34
4. I Ain't No Saint - 5'00
5. Failsafe Day - 4'25
6. Road To Hell - 5'21
7. Doing Time - 4'08
8. Smear Campaign - 4'49
9. Don't Start Me To Talkin' - 3'37
10. Seven Days - 5'15

Bonus Tracks de la réédition de 2000:


1. Seems To Me - 4'54
2. No Peace For The Wicked - 4'06

Cinq années séparent Defender de son prédécesseur Jinx. Un laps de temps conséquent qui témoigne des errements et des doutes du guitariste. Et outre les soucis d'ordres artistiques, il doit faire face à des problèmes d'ordres privés qui ont débouché sur une dépendance à l'alcool et aux médicaments (cf. Anabolisants) qui l'ont profondément marqué physiquement.
Defender est en fait la deuxième tentative de Rory de livrer un nouvel opus depuis Jinx. Initialement un album intitulé Torch devait sortir en 1986 - mais comme pour l'album avorté des sessions de San Francisco de 1977, il l'envoya à la poubelle.
C'est toujours avec Brendan O' Neil à la batterie et le fidèle Gerry McAvoy à la basse que Gallagher enregistre Defender en 1987. Il sort sur son tout nouveau label Capo, crée une fois de plus pour avoir la main mise sur la musique qu'il produit.

Pochette Originale
Kickback City qui ouvre l'album ressemble à une chute de Jinx tant il se rapproche du registre Heavy Rock des titres qui composent cet album. Un riff d'intro lourd, un solo joué sur Coral Sitar et un son de clavier très typé 80's... avec ce titre Rory semble faire ses adieux à la voie Hard/Heavy qu'il avait entrepris à la fin des 70's. Le fait de le voir ouvrir l'album n'est sûrement pas anodin.

Loanshark Blues incarne à merveille la nouvelle voie sur laquelle Rory à décidé de s'aventurer. En réalité plus qu'une nouvelle orientation, il s'agit avant tout d'un retour aux sources. En effet c'est sous les traits du Blues que Rory fait son retour. Moins flamboyant et tape à l'oeil qu'auparavant c'est sous un jour plus mature et réfléchi qu'il aborde de nouveau cette musique sur disque. Loanshark Blues s'inscrit dans un registre Swamp Blues de par son rythme.

La passion de Rory pour les polars et romans d'espionnages atteint son paroxysme avec Continental Op. Inspiré du héros du même nom, crée par le célèbre auteur de roman noir Dashiell Hammett, le titre se présente sous la forme d'un boogie rock solide. Un nouveau standard scénique qui ouvrira la majorité des concerts du guitariste jusqu'à l'ultime prestation de janvier 1995.

I Ain't No Saint poursuit dans la même veine bluesy mais cette fois Rory doit rivaliser de virtuosité avec l'harmoniciste Mark Feltham (ex- Nine Below Zero) qui intègre le Rory Gallagher Band de la plus belle des manières. L'intégration d'un harmoniciste aussi talentueux va apporter un équilibre et une nuance à la musique de Gallagher qui avait fait défaut sur les derniers albums.


Dashiell Hammett le créateur du Continental Op.
Rory renoue avec le Rock sous les traits de Failsafe Day où il fait part de son angoisse de la prolifération des armes nucléaires. Une composition assez moyenne finalement, le riff rappelant par moment le riff du Start Me Up des Rolling Stones. Ce qui pèche sur ce titre c'est le chant de Rory sur les couplets sonnant assez mainstream.
Au sujet de la voix, il est intéressant de constater son évolution depuis ses débuts. D'une voix claire et rocailleuse, il est passé à une voix très grave. Un changement sûrement à mettre au crédit d'une consommation excessive d'anabolisants mais aussi des tournées à répétition.
Road To Hell joue lui aussi dans une veine Rock stonienne mais avec plus de réussite.

Doing Time est à l'image des boogie rock fiévreux que Gallagher composait dans les 70's. Un riff de guitare tranchant avec de grosses parties de slide guitar soutenue par une rythmique sans faille.
Plus léger Smear Campaign où Rory joue en son clair est une compo plaisante à défaut d'être originale. Toutefois il est intéressant de se pencher sur les paroles où Rory dénonce la corruption politique.

Don't Start Me To Talkin' est la grande reprise Blues de l'album Defender. A l'origine joué par le bluesman harmoniciste Sonny Boy Williamson II (aka Rice Miller), l'apport de Mark Feltham est pour ainsi dire primordiale. Rory de son côté n'est pas en reste car il montre, en cette décennie du second revival Blues, qu'il fait partie de ceux qui connaissent le mieux cette musique.

L'édition originale de 1987 se termine avec un titre acoustique. Seven Days renoue avec le Blues acoustique après tant d'année d'absence de ce style dans la discographie de l'irlandais. Un Blues tout à fait personnel loin des stéréotypes éculés, même si le texte colle parfaitement aux codes du genre, l'intro à consonance celte suffit à elle seule d'en faire l'un des blues les plus personnels de sa discographie. A noter le retour furtif d'un revenant en la personne de Lou Martin au clavier.

Le remasters de 2000 voit l'intégration de deux bonus tracks qui étaient en réalité présents sur un single accompagnant la première édition de l'album.
Sur Seems To Me le rapprochement avec Stevie Ray Vaughan est tentant. En effet la compo est assez proche des shuffles texan que le guitariste américain avait pour habitude de parsemer au gré de ses albums.
Par contre No Peace For The Wicked aurait largement mérité de figurer dans la tracklist de l'album original. Un titre rappelant les chants de chain gang de par son rythme de batterie et le son poisseux de la guitare rappelant les pionniers du Delta Blues tel que Son House.


Bien qu'étant sorti dans l'indifférence quasi générale car passé de mode, Defender est l'oeuvre d'un artiste mature qui a roulé sa bosse. Un album sans artifice d'un musicien sincère - l'ultime oeuvre du guitariste allait bientôt prouver cet état de fait...







vendredi 4 mars 2011

Jinx (1982)

La poisse



1. Big Guns - 3'34
2. Bourbon - 4'06
3. Double Vision - 5'07
4. The Devil Made Me To Do It - 2'54
5. Signals - 4'46
6. Jinxed - 5'03
7. Easy Come Easy Go - 5'48
8. Nothin' But The Devil - 3'12 (Bonus Track de la seconde réédition)
9. Ride On Red, Ride On - 4'36
10. Lonely Mile - 4'40 (Bonus Track de la seconde réédition)
11. Loose Talk - 4'08

De tous les albums de Rory Gallagher - Jinx est celui qui divise le plus les fans. En cause une production typée 80's qui tranche avec le son des opus précédents. Un certain manque d'inspiration de la part de Gallagher n'est pas à exclure - après 4 années à jouer dans le registre Heavy Rock avec le format trio, les bons riffs et mélodies semblent s'épuiser. L'album marque l'arrivée du batteur Brendan O'Neil (ami d'enfance et compagnon de route de Gerry McAvoy à ses débuts) derrière les fûts, à la place de Ted McKenna qui a quitté le Rory Gallagher Band un an plus tôt.

A l'image des nombreuses rééditions et modifications au niveau de son contenu, on est en droit de se demander si Rory était content du pressage initial. La réédition de 2000 est celle que j'ai choisi de traiter dans cette chronique.

Pochette de l'album original

Pochette de la réédition CD de 1988
Big Guns, Bourbon, Double Vision, The Devil Made Me To Do It sont à l'image de l'orientation amorcé par Gallagher depuis Photo Finish - du rock minimaliste aux solos dévastateurs, reste qu'on a connu Rory plus inspiré au niveau des riffs. L'arrivée de Brendan O'Neil ne semble pas arranger les choses, il ne s'émancipe pas assez du jeu de son prédécesseur qui avait au moins le mérite d'être énergique dans le registre Rock. Toutefois il serait dommage de condamner définitivement ces titres qui ont pris une autre dimension une fois interprétés sur scène par la formation.

Signals est assez emblématique des problèmes avec la production de l'album. Ouvrant l'album original, il a été judicieusement placé plus loin dans la tracklist des deux rééditions. Si le texte de cette chanson témoigne de la détresse de Rory en ce début des 80's, malheureusement musicalement c'est peu convaincant. C'est en effet l'un des titres les plus datés 80's de la discographie de l'irlandais. L'effet sur la guitare et la manière dont Gallagher chante les couplets achève un titre qui est loin d'être inoubliable.

A l'opposé Jinxed se révèle être une bonne surprise. Rappelant un peu le All Your Love d'Otis Rush, Rory y aborde le thème de la superstition: Ça m'a vraiment affecté lors des 10 dernières années. Je tiens ça de ma grand-mère. Elle était très superstitieuse. C'est devenue une phobie, alors je dois prendre garde. Cela affecte beaucoup ton quotidien. Avant d'aller sur scène, il y a certaine chose que je fais comme des semi sorts de gitans superstitieux que j'adapte à ma façon. Elle n'a pas affecté la musique, Dieu merci. Si tu vas vraiment mal, tu dira "Je jouerai cette note plus que celle là ou je chante cette chanson avant celle là".

Easy Come, Easy Go est l'autre bonne surprise de l'album. Rory renoue avec les ballades mélancolique dont il a le secret. Par miracle la production n'entache pas les parties de guitares de ce titre qui sont absolument savoureuses ainsi que son texte à fleur de peau.
Si les titres acoustiques n'ont jamais quitté la setlist des concerts de l'irlandais, leur absence au sein des albums studio s'est fait cruellement ressentir. C'est sans doute pour combler cette lacune que Nothin But The Devil (du bluesman Lightnin' Slim) a été rajouter dans la tracklist de la réédition de 2000. A noter que ce titre a été enregistrer bien avant 1982 puisqu'il figurait en face B du single Hellcat accompagnant la version U.K du Live Stage Struck.

Autre reprise blues - Ride On Red, Ride On du bluesman Louisiana Red dans une veine Chicago Blues assez proche de l'original. Mais ce titre sera majoritairement popularisé par Rory en acoustique lors de la tournée suivant la sortie de Jinx.
Si le son de guitare sur Lonely Mile n'est pas du meilleur effet, l'insertion de ce titre en bonus track sur la réédition de 2000 est une petite bouffée d'air frais. L'ajout de cuivres, de l'orgue et de l'harmonica vient étoffer un titre qui contraste complètement avec le minimalisme des compos Heavy Rock qui ouvre l'album.
Loose Talk qui termine l'album renoue avec le Heavy Rock mais de manière plus subtile. L'ajout de la Coral Sitar apporte une couleur particulière au titre.

Brendan O'Neil/Rory Gallagher/Gerry McAvoy
Jinx malgré les bonnes intentions de son auteur est l'album d'un artiste arrivé en bout de course. Après 4 années a évoluer dans le registre Heavy Rock, la messe semble avoir été dite. Les rares moments où il parvient de nouveau à briller c'est lorsqu'il s'écarte un temps soit peu de ce registre.
En proie à la dépression, la sortie de Jinx suivra un vide discographique de 5 ans. Période durant laquelle le guitariste devra subir une violente remise en question.


mercredi 2 mars 2011

Stage Struck (1980)


1. Shin Kicker - 3'58
2. Wayward Child - 4'32
3. Brute Force And Ignorance - 4'32
4. Moonchild - 6'06
5. Follow Me - 5'56
6. Bought And Sold - 4'39
7. The Last Of The Independents - 5'39
8. Shadow Play - 5'08

Bonus Track de la réédition de 2000:

1. Bad Penny - 6'39
2. Key Chain - 5'03

Si les qualités intrinsèques de Live in Europe et de Irish Tour '74 semblent faire l'unanimité. Le contenu de Stage Struck est l'objet de réserves de la part des amateurs du guitariste irlandais. Enregistré durant la tournée mondiale s'échelonnant de novembre 1979 à juillet 1980, ce troisième live à pour objet de montrer le Rory Gallagher Band MKIII au meilleur de sa forme, en compilant les meilleurs moments de cette intense tournée.

De ce côté il n'y a guère de reproche à faire, Rory et son groupe délivre une musique violente à l'image de ses deux derniers albums avec un engouement non feint et une énergie ne retombant à aucun moment. La principale critique de Stage Struck réside dans le choix des titres. Très (trop ?) hard pour la plupart et pas assez à l'image de ce que le groupe produisait à l'époque. Il n'y a aucune place faites aux titres acoustiques et aux tempos lents pour équilibrer l'ensemble. L'autre critique réside dans la production et le mixage de l'album. La qualité sonore varie selon les titres (ce qui renforce l'aspect compilation) et l'omniprésence de l'écho (comme de l'effet flanger) sur la guitare de Rory peut s'avérer lassant à la longue.

Pochette originale
Shin Kicker le titre d'ouverture de Photo Finish et l'opener de la majorité des concerts de l'époque déclenche les hostilités. La version est solide et violente, la section rythmique parfaitement en place et les solos de Rory dévastent tout sur leurs passages.
Wayward Child issu de Top Priority est délivré avec la même cohésion et la même violence que le titre précédent.
Une légèreté apparente fait surface avec Brute Force And Ignorance où l'absence du mur de mandolines ne fait aucunement défaut. Cependant cette version live reste relativement fidèle à la version studio, avec notamment un solo de slide identique.
La présence de Moonchild est de circonstance, le titre étant la compo la plus hard de l'époque du Rory Gallagher Band MKII.

L'insertion de Bad Penny et Key Chain en milieu de la tracklist dans la réédition de 2000 s'avère au final judicieuse. Cela amène une petite accalmie au milieu d'un live assez éprouvant pour l'auditeur. Le premier titre ne surpasse pas l'originale mais le motif rythmique joué par Rory en plein milieu du morceau est du meilleur effet. Par contre on peut discuter du choix de cette version de Key Chain où Rory termine désaccordé.

Après cette brève accalmie retour au registre Hard avec une version honnête et assez fidèle de Follow Me du récent opus.
Bought And Sold souffre quant à lui de la comparaison avec la version de l'album Against The Grain. Et montre clairement la différence entre Rod De 'Ath et Ted Mckenna. Si le jeu de ce dernier est décisif sur les titres hard des deux derniers albums, il peine par contre à convaincre sur les titres du quartette par son manque de nuance.
The Last of The Independents est livré dans une version de bonne facture, sans réelle surprise, tout comme Shadow Play qui se termine en fade out, closant ainsi définitivement l'album.


Au final Stage Struck s'avère être une relative déception. A aucun moment l'album ne surprend l'auditeur, que ce soit par le jeu de Rory qui fait peu dans la nuance et dans l'improvisation contrairement aux deux lives précédents. Il faut sûrement y voir là une tentative de Gallagher de coller à la mouvance Hard & Heavy montante de la fin des 70's et du début des 80's.
Un choix assez malheureux quand on connait la polyvalence d'un tel musicien. Malheureusement il n'aura plus jamais l'occasion de corriger le tir, puisqu'il s'agit du dernier live publié de son vivant.